mercredi 23 décembre 2009

Le miroir

C'est mon anniversaire aujourd'hui.

Je repense à tous ces bonheurs, qui ont fleuri dans ma vie et qui sentent la vanille. Je ne sais pas pourquoi, mais il me revient aussi un goût amère. Et puis si, je le sais. Mon anniversaire me rappelle inévitablement mes échecs, mes regrets. Comme cette fille qui réussit mieux que moi, mais avec qui je n'ai jamais pu discuter, partager mes désaccords. Cette fille blonde et froide, qui n'aimera probablement jamais la littérature.

J'ai envie de répondre aux gens qui crient des injures aux pauvres commis du supermarché. J'ai parfois envie de doucement leur toucher l'épaule et de les regarder, froidement, en leur disant : « Mais pourquoi tant de méchanceté ? ». J'ai envie leur faire voir à quel point ils sont amères et combien leur mots peuvent blesser, se loger dans un coeur en le rendant fragile. J'ai envie de tendre devant eux un miroir. Faire miroiter leur bêtise.

Personne n'aime observer son reflet dans un miroir.

J'aurais bien envie de faire tout ça, avec cette force de caractère que je n'ai pas. Heureusement, il restera toujours les livres. Ces bribes de mots, seules richesses capables de faire réfléchir l'humain sur ses propres imperfections.

mercredi 16 décembre 2009

Noël

L'hiver glisse tranquillement dans les rues. Combiné aux jours qui précèdent Noël, il peut franchement être intolérable. J'ai une impression de déjà-vu. Les rues et les artères deviennent impraticables; les gens irritables, prêts à se battre pour vous dépasser dans les files d'attente.

Quoique mon impatience devant leur manque de savoir-vivre m'écoeure tout autant. Je suis pire qu'eux, finalement.

Pourquoi aime-t-on Noël à ce point, dans ce cas ?

Les gens aiment Noël parce que cette fête raconte des histoires. Une en particulier, certes, celle de la naissance de Jésus. Mais pas que celle-là. Noël sous-tend des milliers de microcosmes de vies humaines qui s'assemblent. La fable chrétienne rammène les gens à l'essentiel : l'amour, le don de soi. On dira ce qu'on voudra, mais une histoire qui chante l'espoir ne peut être que vitale, surtout dans le siècle dans lequel nous vivons. Les gens ont besoin de croire. Ils doivent se faire raconter des histoires.

lundi 2 novembre 2009

Création

J'ai mal au ventre.
Je ne trouve pas les mots. J'aimerais être assez poète, écrire comme Françoise Sagan, pour le dire. J'ai des désirs improbables et irraisonnés, je sais bien tout cela. Je ne sais pas les rendre complices de ma créativité. Peut-être que la vraie force de l'écrivain est celle de rendre tout ce qui vit en lui, bouillonne, matière à création. Ou peut-être pas. Peut-être que la fabulation est l'unique matériau. Peut-être que je fabule ma vie, tout compte fait.

dimanche 25 octobre 2009

Biscuit

Il y a des yeux dans lesquels on peut, semble-t-il, lire de grandes vérités.

Je ne suis pas experte en la matière, mais il me semble possible d'affirmer que les yeux de certaines personnes, comme les livres, peuvent nous permettre de lire des choses exceptionnelles, marquantes, bouleversantes.

J'y crois. Cette idée me semble si forte. Et puis, non. Les idées sont si malléables. Si c'était - non pas les yeux des autres qui donnent à lire de grandes vérités - moi qui transposais mes vérités, désirs, certitudes dans les yeux des autres ?

Même ritournelle en ce qui concerne la lecture ; certains sont d'avis que le texte ne parle pas. Ce sont les lecteurs qui créent leur lecture, qui voient ce qu'ils veulent bien voir dans les livres.

jeudi 17 septembre 2009

ensoleillé d'existence (Robelys)

Il venait, ensoleillé d'existence

Il n'avait que la peau, les os, quelques vêtements rapiécés
sur l'océan son rire se fracassait
le plus magnifique soleil de Varadero.

il était l'évidence même de la bonté.
et de l'injustice.

J'ai le goût de vomir à présent quand je vois l'humain cracher sur sa chance.

mercredi 2 septembre 2009

Difficile

Comment puis-je le dire ?

mes mots sont des rochers
sur lesquels ta volonté se heurte.

il n'y a personne qui résiste à ces tempêtes.

il fait froid, viens.

mercredi 15 juillet 2009

Réciter sa vie

Je me hasarde ici à une expérience narrative. Soit ce premier récit :
Je suis américaine. J'ai trente-deux ans. J'ai le visage d'une femme normale ; je souris aux inconnus et je remercie poliment lorsqu'on m'ouvre la porte. Pourtant, il m'arrive de boire jusqu'à trois bouteilles de vin par jour quand je me sens vulnérable. Quand me vient l'idée de me balancer du haut de mon balcon. La mort me regarde souvent, droit dans les yeux. Elle m'invite, me tente, me cherche. Ce qu'elle seule peut m'offrir m'attire dangeureusement. « Viens, Christine, viens, grâce à moi, tu oublieras ». Car c'est bien ce que je voudrais, oublier toutes celles qui ont défilé dans ta voiture, dans tes bureaux, dans ces chambres d'hôtel anonymes que tu louais à l'heure. Perdre de vue ces soirées seule, ces téléphones courts et froids. T'oublier toi aussi, Paul. Oublier ce qui fut notre vie.
Maintenant, considérons, en gardant en tête le premier fragment, ce deuxième récit :
J'habite El paso. Je viens de célébrer, avec ma soeur, mon quarantième anniversaire. Je suis divorcé, aujourd'hui. En fait, je n'avais jamais voulu me marier, mais elle était belle et avait... un père italien. Surtout, j'avais 19 ans. Je sors de mon mariage comme d'un guerre, mes plaies se referment, peu à peu. Je vais mieux. J'émerge de ce que je crois être un enfer ridicule, meublé de colères longues et interminables, de discussions inexistantes, de regrets gonglés à bloc. Elle ne faisait que pleurer, répétant qu'elle ne voulait pas que nous nous quittions. Sans emploi, sans amis, qu'aurais-je pu faire ? Je ne l'aurai jamais rendu heureuse.
Qu'est-ce à dire ? Oui, bien sûr, la sacro-sainte question du point de vue, celle de cette mosaique d'opinions divergentes sur un même sujet.
Mais je voudrais en venir à une autre considération, purement narrative. Il faut admettre, en fait, à quel point le récit participe, par sa forme même, à la signification, tant des oeuvres actuelles que des histoires les plus banales. La façon de raconter, de prendre en charge un texte, de livrer une « histoire », est aussi importante que l'histoire en elle-même. La composition textuelle, par les dimensions qu'elle présente, peut grandement influer sur le pouvoir du récit. Celui invoquant des exemples, des faits accomplis (le premier) vous rendra-t-il plus à sensible que celui présentant le ressenti du sujet, n'ayant qu'une crédibilité douteuse (le deuxième) ?
Ceci dit, je me mouille : les mots sont puissants. Peut-être plus que les bombes.

lundi 13 juillet 2009

Obsessions

Elle avait une obsession. Cette chose qui l'aidait à conserver bien vivants, au fond de sa mémoire, ses désirs les plus chers. Celle-là variait selon les jours qui défilaient, les villes au creux desquelles elle se lovait, les jeux auxquels elle s'adonnaient. Elle disait que la vie n'était qu'une question de traumatismes. Que seuls les échos les plus forts marquent. Ce qu'elle aimait, elle le faisait de manière obstinée. Je me plais à croire qu'elle détenait la meilleure recette pour mener à terme ses rêves.